La Chine devance toujours plus les États-Unis dans le domaine de l’intelligence artificielle (IA). Le 9 novembre dernier, l’institut chinois de recherche scientifique et technologique Damo Academy – une filiale du géant du commerce électronique Alibaba – a annoncé que son système d’intelligence artificielle M6 a augmenté le nombre de ses paramètres de 1 billion à 10 billions, dépassant de loin les modèles précédemment conçus par Google et Microsoft.
C’est dans le domaine militaire que cette prouesse chinoise serait la plus menaçante pour Washington. “Celui qui gagnera la course à l’IA contrôlera la planète”, avait affirmé dans une tribune publiée par le Financial Times, l’ancien chef des logiciels de l’US Air Force, Nicolas Chaillan. Ce dernier ajoutait également que “sans action urgente les États-Unis perdront la guerre de l’intelligence artificielle contre la République populaire d’ici un an”.
Une déclaration visionnaire. En effet, les chercheurs militaires de l’Université navale d’ingénierie de Wuhan utilisent massivement l’IA pour développer des nouvelles armes. Selon le South China Morning Post, l’équipe du professeur Zhang Xiao a mis au point le “plus petit pistolet à bobine du monde”. Ce prototype est doté d’un canon de 12 centimètres, de la taille d’un pistolet, qui contient trois bobines alimentées par une batterie générant un champ électromagnétique.
Grâce à ce champ électromagnétique, la balle tirée par le pistolet ne touche pas les parois lorsqu’elle traverse le canon. Les chercheurs ont constaté que l’énergie cinétique de la balle pouvait atteindre près de 150 joules, soit plus du double de l’énergie nécessaire pour tirer un coup fatal. La vitesse de la balle peut varier en fonction de facteurs tels que sa taille et son poids. Selon les scientifiques, l’un des principaux avantages de l’utilisation d’un pistolet à bobine est que, contrairement à un pistolet classique, il peut être réglé pour tirer des coups mortels ou non. Les chercheurs chinois affirment qu’il aurait été impossible d’atteindre ce niveau de performance sans utiliser l’IA dans le processus de conception.
Bien plus sophistiquées que les armes à feu classiques, les armes électromagnétiques sont aussi plus difficiles à concevoir. Par exemple, d’infimes différences dans la taille et la forme des bobines peuvent avoir un impact considérable sur les performances.
La batterie utilisée dans l’arme est un dispositif complexe avec de nombreux réglages qui peuvent également avoir un impact significatif sur l’efficacité de l’arme. Ces éléments, associés à d’autres détails tels que la conception de la balle et du canon, ont rendu le pistolet à bobine trop complexe pour que les logiciels d’armes traditionnels puissent le gérer. “Mais l’IA peut partir d’une conception imparfaite et apporter des améliorations continues en tirant les leçons des erreurs précédentes”, a confié le professeur Zhang Xiao.
La Chine développe des railguns
Les chercheurs de l’armée chinoise utilisent déjà l’IA pour développer des armes électromagnétiques à grande échelle, telles que les railguns, qui peuvent tirer des projectiles possédant une portée de plusieurs centaines de kilomètres. Selon le South China Morning Post, la marine chinoise a récemment construit une installation d’essai pour utiliser l’IA afin de développer des munitions intelligentes de type railgun capables de supporter une pression extrêmement élevée et des champs magnétiques intenses, ce qui les rend plus efficaces dans toute une série d’opérations.
En juillet, la marine américaine a suspendu un programme de railgun qui avait connu des difficultés techniques et progressé lentement au cours des 15 dernières années. Elle a finalement décidé de concentrer ses ressources sur le développement d’armes hypersoniques. De son côté, le Bureau des équipements de munitions du Département de l’armement naval à Pékin a récemment déclaré que la Chine s’en tiendrait à son programme de railguns.
« La portée des canons électromagnétiques à bord des navires peut atteindre 200 km . En d’autres termes, il est possible d’obtenir un appui-feu continu et des frappes sur appel à moins de 200 km de la côte », a indiqué une étude publiée la semaine dernière dans le Journal of Gun Launch and Control. C’est une arme qui pourrait donc être utilisée lors d’une potentielle invasion de Taïwan par la marine chinoise.
Par Thomas Romanacce ; Publié le
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